Candidoses cutanées et muqueuses
Les infections de la peau et des muqueuses peuvent se produire aussi bien chez des sujets sains que chez des individus immunodéprimés. Elles sont principalement dues à des modifications de l’hydratation, du pH, des concentrations de nutriments ou de l’environnement microbien de la peau et des muqueuses. On connait désormais plusieurs déterminants de susceptibilité génétique dans les formes chroniques ou récidivantes. Les candidoses cutanées se développent dans les zones de transpiration, comme l’aine, les aisselles, les zones interdigitales, et sur les endroits brûlés ou écorchés. Les Candida peuvent infecter différentes muqueuses : la cavité buccale, la muqueuse vaginale et l’œsophage.
L’une des candidoses les plus connues touchant la cavité buccale est le muguet qui affecte fréquemment le nouveau-né, les patients traités par antibiotiques à large spectre et les personnes immunodéprimées, surtout celles atteintes du sida.
Les candidoses génitales ou vulvo-vaginites sont également fréquentes et dues dans 80% des cas à l’espèce Candida albicans. Elles ne sont pas considérées comme des maladies sexuellement transmissibles et peuvent être le signe d’un diabète. Les causes de récidives sont nombreuses : les médicaments (cures répétées d’antibiotiques), les œstrogènes, les corticoïdes et immunosuppresseurs, la contraception par stérilet ou diaphragme.
Les candidoses de l’œsophage enfin accompagnent souvent l’infection par le VIH. Elles nécessitent des traitements antifongiques dont les modalités et les durées sont adaptées à chaque situation, et font l’objet de recommandations internationales auxquelles participe le Centre National de Référence des Mycoses Invasives et Antifongiques.
Les candidoses systémiques
L’incidence des candidoses systémiques a augmenté en France au cours des dix dernières années. Les candidoses systémiques relèvent de deux mécanismes différents sur le plan physiopathologique. Elles peuvent en effet être la conséquence de contaminations nosocomiales « exogènes » souvent chez des patients ayant des cathéters intravasculaires (produits de perfusion, transmission manuportée). Elles peuvent aussi être consécutives au passage vers le sang et les organes profonds de levures ayant colonisé des sites digestifs et/ou génito-urinaires « endogènes ». Cet évènement est favorisé par la fragilisation des muqueuses après les chimiothérapies et par des traitements antibiotiques prolongés principalement chez les patients hospitalisés en réanimation, notamment chirurgicale mais aussi chez des patients neutropéniques (atteints de déficit en certains globules blancs, les neutrophiles).
Les facteurs de risque de candidoses systémiques sont nombreux : neutropénie prolongée, allo et autogreffe de moelle, corticothérapie, chirurgie digestive lourde, réanimation, prématurité, brûlures étendues, etc. Toutes les localisations peuvent se voir, en particulier les localisations rénales, valvulaires cardiaques.
Au plan épidémiologique, tous facteurs de risque confondus, l’espèce Candida albicans est responsable d’environ la moitié des infections. Viennent ensuite, en France, Candida glabrata, Candida parapsilosis et Candida tropicalis. Les autres espèces sont moins fréquentes et leur émergence dépend souvent d’écologies particulières. L’identification de certaines espèces peut modifier la prise en charge thérapeutique en raison de leur résistance intrinsèque à certains antifongiques.
Le diagnostic des candidoses systémiques s’appuie sur la notion de fièvre prolongée résistante aux traitements antibiotiques chez un patient à risque de candidémie. La positivité d’une hémoculture permet le diagnostic. Le traitement antifongique doit être systématique ainsi que le retrait des cathéters intravasculaires souvent colonisés. La mortalité reste voisine de 40%.
A l’Institut Pasteur
L’Unité de Mycologie moléculaire (dirigée par Françoise Dromer), également Centre National de Référence Mycoses Invasives et antifongiques a mis en place en 2002 un « Observatoire des levures » en Ile-de-France qui permet de surveiller l’épidémiologie des fongémies à levures dans des hôpitaux de court séjour de l’AP-HP en étudiant tout particulièrement les levures en cause, leur profil de sensibilité aux antifongiques et les tendances évolutives depuis le début de l'observatoire. Ces analyses sont faites en collaboration avec Santé Publique France. L'épidémiologie des candidoses systémiques est également surveillée par le Centre National de Référence au travers d’un réseau de laboratoires hospitaliers en métropole et dans les territoires ultramarins mis en place en 2012.
L’unité de Biologie et pathogénicité fongiques, dirigée par Christophe d’Enfert, s’appuie sur des outils d’analyse du génome de Candida albicans afin de définir les processus mis en jeu lors de la formation de biofilms par cette levure pathogène. Elle s’intéresse par ailleurs aux mécanismes contrôlant la transition entre les formes levures et filamenteuses chez Candida albicans, processus qui jouent un rôle important au cours de l’infection. L’unité Biologie et pathogénicité fongiques a par ailleurs développé des outils moléculaires et mis en place des bases de données internationales pour permettre une meilleure compréhension de l’épidémiologie des infections à Candida albicans, notamment nosocomiales, et l’étude de l’évolution des souches.
Juin 2021