Après son baccalauréat, Eliette a choisi les sciences et c’est au fil de son parcours, en se confrontant à la réalité du travail scientifique puis en faisant des choix, que la recherche s’est imposée à elle.
Éliette a effectué, dans un premier temps, un DEA au CEA de Saclay dans le service de biochimie. Puis, elle a souhaité poursuivre le projet de recherche qu’elle avait initié et passer une thèse. Malgré le départ de son directeur de laboratoire pour les États-Unis, elle décide de réaliser, coûte que coûte cette thèse. C’est à l’Institut Pasteur dans l’unité dirigée par le Pr Antoine Danchin qu’elle effectue son doctorat. En découvrant ce lieu historique et l’émulation scientifique qui y règne, la jeune chercheuse décide d’y rester. Son premier contrat sera un poste d’ingénieure de recherche dans l’unité Programmation moléculaire et toxicologie génétique dirigée par le Professeur Maurice Hofnung. C’est à cette période qu’elle commence à s’intéresser aux agents chimiques et à leurs propriétés mutagène et cancérogène.
La recherche pas à pas
Par la suite, elle franchit une à une les étapes clé du chercheur qui lui permettront de travailler sur ses propres sujets. En 2001, elle obtient son habilitation à diriger la recherche (HDR) à l’université Paris 7, puis en 2002 elle est promue chargée de recherche. C’est à cette période qu’elle décide de développer un projet plus médical. Elle rejoint alors l’unité Pathogénie bactérienne des muqueuses dirigée par le Professeur Agnès Labigne et se met à travailler sur Helicobacter pylori et son rôle dans le développement du cancer gastrique. H. pylori est une bactérie qui vit et survit en milieu hostile, dans l’acidité de nos estomacs. Si de très nombreuses personnes sont porteuses de cette bactérie et si dans la plupart des cas cela n’a pas de conséquences graves, elle provoque cependant chez 1 à 3 % des individus un cancer. Dans certains pays, le cancer gastrique est la première cause de mortalité. Son travail consiste à étudier les dommages infligés par ce microorganisme sur l’ADN de nos cellules. En 2003, elle publie, dans la revue scientifique Gastroenterology la preuve que cette bactérie endommage l’ADN de nos cellules gastriques, un événement jouant un rôle important dans la promotion des lésions cancéreuses. Helicobacter pylori a donc le triste privilège d’être la première bactérie directement impliquée dans la genèse d’un cancer.
Pouvoir dépister un cancer précocement
Aujourd’hui, dans l’unité de Pathogenèse de Helicobacter dirigée par Hilde De Reuse, Éliette est responsable du groupe Infection, génotoxicité et cancer. Un de ses projets est la recherche d’un biomarqueur capable de dépister précocément le cancer gastrique. Car, en général, celui-ci est diagnostiqué à un stade trop avancé et donc difficile à soigner. Notre chercheuse a mis en place des collaborations pour étudier des échantillons de patients atteints de gastrites, d’ulcères ou de cancer. « Une première collaboration avec un laboratoire au Mexique a pu se mettre en place suite à un congrès auquel j’avais assisté au Costa Rica ». Des recherches cliniques, sont aussi en cours. En collaboration avec le Professeur Dominique Lamarque de l'hôpital Ambroise Paré à Boulogne Billancourt, cette étude à partir d’échantillons sanguins de patients va permettre de caractériser à un stade très précoce, un certain nombre de candidats biomarqueurs du cancer gastrique. Pour Éliette, qui avait envisagé un temps de faire médecine, cette recherche appliquée lui tient particulièrement à cœur. « En recherche, il faut être patient, avoir de la persévérance et puis se démener tout le temps ».
Si, par nature, Éliette affirme avoir un tempérament plutôt discret, cela ne l’empêche pas de mener de nombreuses actions en France ou à l’étranger. Cette année, elle a organisé un cours à l’Institut Pasteur du Maroc, elle a donné des séminaires à l’université de Florence en Italie et a aussi présenté son travail auprès de jeunes étudiants en science au lycée français Victor Hugo à Florence. Dans le groupe qu’elle dirige, Éliette encadre aussi des étudiants en thèse :
Eliette Touati, responsable du groupe Infection, génotoxicité et cancer
Une chose importante pour moi est de pouvoir avancer dans une bonne ambiance de travail et ensemble avec mes étudiants et collaborateurs. Et lorsque l’on reçoit des nouvelles de nos anciens étudiants lors de l’obtention d’un poste, c’est toujours une joie que l’on partage.
Eliette Touati en quelques dates
Depuis 2018 : directrice de recherche, Institut Pasteur, Paris, France
Depuis 2015 : responsable du groupe Infection, génotoxicité et cancer dans l’unité de Pathogenèse de Helicobacter, Institut Pasteur, Paris, France
2002 : Presidents’ award for Scientific Excellence 6e Symposium international d’oncologie prédictive
2001 : habilitation à diriger des recherches (HDR), université Paris 7
1986 : doctorat en sciences, option Biologie cellulaire et moléculaire, université Paris 6
1983 : diplôme d’étude approfondie (DEA), Master 2, université Paris 6