Hélène Sparrow : chasseuse de microbes

Française d’origine polonaise, médecin et biologiste, Hélène Sparrow traversa guerres et révolution, passant du chevet des soldats à son laboratoire de recherche.

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En 1915, Hélène Sparrow, jeune médecin élevé à Kiev, s’engage dans l’Armée Russe pour faire face aux épidémies sur le front de l’Est, puis intègre l’Institut de bactériologie de Kiev. C’est là qu’elle commence à travailler sur une maladie qui pendant la Première guerre mondiale causa plus de morts que les armes : le typhus. Elle en fait son sujet de thèse à l’Institut d’hygiène de Varsovie, dans sa Pologne d’origine, où elle se réfugie pendant la révolution russe.

Une formation dans le réseau Pasteur

En 1923, elle part se former auprès des pasteuriens. A Lille, elle assiste aux premières préparations du BCG par Calmette et Guérin. Elle part ensuite à Strasbourg, au Brabant, puis à l’Institut Pasteur de Paris où elle suit le Cours de Microbiologie. Puis, à l’Institut Pasteur de Tunis, elle est formée par celui qui deviendra son mentor : Charles Nicolle, prix Nobel de médecine 1928 pour ses découvertes sur le typhus.

Percer à jour et combattre les bactéries

De retour en Pologne, elle organise une campagne de vaccination contre la scarlatine. Elle devient Professeur à l’Université de Varsovie, où elle occupe la chaire de bactériologie. Tout en menant ses recherches, elle lutte contre le choléra et organise le contrôle sanitaire des Polonais rapatriés de Russie. En 1931, elle part en mission au Mexique et au Guatemala avec Charles Nicolle, qui l’embauche deux ans plus tard à l’Institut Pasteur de Tunis.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, elle maintient son travail scientifique dans une Tunis bombardée. Elle reçoit des réfugiés français tels que André Gide, et cache des résistants et déserteurs polonais de l’armée allemande. Elle poursuit jusqu’à un âge tardif ses recherches sur le typhus et d’autres maladies, partant encore pour l’OMS à 67 ans étudier des foyers de fièvre en Éthiopie. « Elle fut une des personnalités les plus connues des cercles internationaux en épidémiologie ces 25 dernières années. Son génie scientifique, son énergie phénoménale et son enthousiasme (…) allaient de pair avec a grande beauté et son charme prodigieux » relatait le British Medical Journal à son décès, en 1970.

 

Quand Hélène Sparrow fit d'elle-même un cobaye

En 1921, Hélène Sparrow commet un acte qui marque les esprits de l’époque. Le célèbre pédiatre Robert Debré, son admirateur et ami, écrivait : « elle avait pensé atténuer l’agent responsable [du typhus] (…) et avoir transformé le germe pathogène en un produit vaccinal que les chercheurs de différents laboratoires du monde tentaient d’obtenir. Pour vérifier son hypothèse, Hélène Sparrow s’injecta la préparation qu’elle avait réalisée, mais l’agent pathogène n’était pas suffisamment atténué et le mal terrible se déclara. Son entourage effrayé s’interroge sur la nature de la maladie ; c’est alors seulement qu’Hélène Sparrow avoue son acte téméraire qui heureusement ne lui coûta pas la vie ». Robert Debré y voit un épisode qui montre « bien la noblesse du caractère d’Hélène Sparrow et qui plus qu’aucune phrase élogieuse la peint telle qu’elle fût ».

 

Chronologie de la vie d'Hélène Sparrow

> 5 juin 1891

Elle naît près de Kiev (Russie), de parents polonais.

> 1915

Elle devient médecin dans les formations sanitaires de l’Armée russe.

> 1918 -1920

Elle entre à la clinique universitaire de Dorpat (Estonie), puis à l’Institut de bactériologie à Kiev.

> 1920

Elle devient chef du service de vaccinations préventives à l’Institut d’hygiène de l’État à Varsovie et accomplit une mission sur le choléra à Grodno (Biélorussie).

> 1921-1933

Elle fait des recherches à l’Institut du typhus exanthématique de l’université de Lwow (Pologne).

>1922

Elle organise le contrôle sanitaire des Polonais rapatriés de Russie.

> 1923-1924

Elle suit des stages dans des Instituts Pasteur (Lille, Bruxelles) et à l’Institut d’hygiène de Strasbourg, ainsi que le cours de microbiologie à l’Institut Pasteur à Paris.

> 1925

Elle suit un stage sur le typhus à l’Institut Pasteur de Tunis auprès de Charles Nicolle.

> 1925

Elle mène une vaccination en masse contre la scarlatine en Pologne, assistée par Robert Debré, envoyé par la Société des Nations.

> 1928

Elle soutient sa thèse : Problèmes de la vaccination contre le typhus exanthématique. Elle devient professeure agrégée de la faculté de médecine de l’université de Varsovie, puis professeure titulaire de bactériologie.

> 1930-1933

Elle organise les vaccinations contre la diphtérie en Pologne.

> 1931

Elle accomplit une mission d’étude du typhus au Mexique et au Guatemala avec Charles Nicolle.

> 1933

Elle devient cheffe de laboratoire à l’Institut Pasteur de Tunis et obtient sa naturalisation française.

> 1940

Elle met au point le vaccin antityphique "Durand-Sparrow".

> 1945-1960

Elle instruit des bactériologistes américains et anglais.

> 1949

Elle devient cheffe du service du BCG de l’Institut Pasteur de Tunis.

> 1958

En Éthiopie, elle accomplit pour l’OMS une mission sur une fièvre récurrente.

> 13 novembre 1970

Elle décède en Corse.

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