Découverte d'une nouvelle maladie ribosomique chez l’homme pouvant engendrer une inversion sexuelle ou une régression testiculaire

Communiqué de presse
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La détermination sexuelle est le processus au cours duquel un organisme sexué devient mâle ou femelle. Un consortium multinational, dirigé par des chercheurs de l'Institut Pasteur, vient de faire une percée dans la compréhension de l’origine génétique de la détermination du sexe chez l’Homme. Ils ont découvert que DHX37, un gène fortement conservé au cours de l’évolution et jusqu’à présent seulement connu pour son rôle dans la biogenèse des ribosomes, est impliqué à la fois dans la détermination et le maintien de l’identité des tissus testiculaires. Il s’agit là de la première cause génétique à être identifiée pour la régression testiculaire. Ces résultats ouvrent la voie vers une meilleure compréhension de l’origine génétique des anomalies du développement sexuel. Ces résultats, qui seront publiés prochainement dans la revue Genetics in Medicine, sont accessibles en ligne.
 

Les anomalies du développement sexuel regroupent des affections rares et complexes dont les causes sont multiples. La plupart de ces affections entraînent une ambiguïté sexuelle à la naissance, mais certaines peuvent n’être diagnostiquées qu’à l’âge adulte. Parmi ces troubles, le « syndrome de régression testiculaire » est une maladie très rare qui se caractérise par l'absence uni ou bilatérale de testicule d'origine embryonnaire. En effet, ce syndrome touche environ 1 garçon sur 2 000. Cela représente environ 32 700 naissances par an dans le monde entier et, en France plus particulièrement, cela pourrait correspondre à environ 180 naissances par an.

Au moyen de tests génomiques, les chercheurs de l’Institut Pasteur, en collaboration avec de nombreuses universités et centres hospitaliers étrangers, ont identifié des mutations de novo récurrentes chez des individus présentant des troubles du développement sexuel. Ces mutations sont localisées dans des domaines hautement conservés du gène DHX37, dont la séquence code pour la protéine DHX37.

Leurs résultats indiquent que 11% des patients présentant un défaut complet de détermination des testicules portent des mutations dans ce gène. De plus, 25% des garçons atteints du syndrome de régression testiculaire, également connu sous le nom de testicule évanescent, portent des mutations pathogènes dans ce gène. Ces chiffres font des mutations dans DHX37 une cause importante d’anomalies du développement sexuel.

« C'est la première fois qu'une cause génétique est identifiée pour la régression testiculaire. Le gène que nous avons identifié joue un rôle essentiel dans la détermination testiculaire, et il est donc nécessaire de posséder un gène sain tant pour le développement du testicule, que pour le maintien du tissu testiculaire. Nos résultats prouvent aussi que les mutations dans le gène DHX37 sont une des causes les plus courantes d'inversion sexuelle identifiées chez l’homme. »
Dr Kenneth McElreavey, premier auteur de l’étude et chef de l’unité Génétique du développement humain à l’Institut Pasteur

DHX37 est une protéine fortement conservée au cours de l’évolution. Elle est connue pour être essentielle à la biogenèse du ribosome, plus particulièrement de sa petite sous-unité. « La relation entre la protéine DHX37 et les voies de régulation « pro-mâle » et « pro-femelle » impliquées dans la détermination du sexe est totalement inattendue », précise Dr McElreavey.

Ces nouvelles données indiquent que certaines anomalies du développement sexuel sont à ajouter à la liste des ribosomopathies. Les ribosomopathies sont des maladies humaines associées à la biogenèse des ribosomes. Elles forment une branche émergente et, pour l’instant, mal comprise de la médecine. En effet, la communauté scientifique ne sait toujours pas comment les variantes des protéines impliquées dans la biogénèse des ribosomes produisent des phénotypes humains différents et hautement spécifiques.

Comme le souligne Dr Anu Bashamboo, dernière auteure de l’étude et chercheuse à l’Institut Pasteur : « De par son double rôle dans la biogenèse du ribosome et dans la détermination du sexe, la protéine DHX37 nous pousse à repenser la cause des troubles du développement sexuel chez l’Homme. Nos observations incitent à un changement de paradigme dans la compréhension de ces troubles et des mécanismes plus larges qui participent à la détermination du sexe chez les vertébrés. Cela ouvre aussi de nouvelles pistes de recherche pour mieux comprendre la relation entre les ribosomes et les maladies humaines. »


- Pour plus d’information -

La détermination sexuelle

La détermination sexuelle est le processus au cours duquel un organisme sexué devient mâle ou femelle. Cependant, les composants et les mécanismes à l’œuvre dans la détermination du sexe chez les mammifères sont pour l’instant largement inconnus. Des données récentes de l'unité de Génétique du développement humain à l’Institut Pasteur, montrent que, chez les mammifères, le choix de former un testicule ou un ovaire est le résultat d'un conflit moléculaire entre des réseaux de régulation « pro-mâle » et « pro-femelle » qui sont antagonistes. Une approche puissante et non biaisée pour comprendre ces mécanismes consiste à réaliser des tests génomiques sur les patients qui souffrent de troubles du développement sexuel, afin d’identifier les mutations responsables de la pathologie.


Le syndrome de régression testiculaire (ORPHA 983)

L'agénésie testiculaire XY, également appelée « syndrome de régression testiculaire », est une maladie très rare. Elle regroupe un vaste ensemble d'anomalies des organes génitaux internes et externes, lié à une anomalie du développement testiculaire survenant entre la 8ème et la 14ème semaine de vie fœtale. Le phénotype des personnes atteintes est variable en fonction du moment où la régression gonadique in utero survient. Il s'étend d'un phénotype féminin à un phénotype masculin avec anorchidie (absence de testicule), chez des patients dont le caryotype est 46,XY. Si la régression testiculaire survient précocement, entre 8 et 10 semaines de grossesse, le phénotype des patients est celui d'une fille avec ou sans ambiguïté des organes génitaux externes, une absence de gonades et un utérus hypoplasique. Si la régression survient après 12 semaines, le phénotype est celui d'un garçon présentant une anorchidie ou des testicules hypoplasiques.


Les ribosomes et les maladies ribosomiques

Les ribosomes sont des complexes composés d’ARN messager (ARNm) et de protéines, extrêmement conservés au cours de l'évolution. Leur fonction est de synthétiser les protéines en décodant l'information contenue dans l'ARNm. Les ribosomes sont constitués de deux sous-unités, une plus petite qui « lit » l'ARNm et une plus grosse qui se charge de la polymérisation des acides aminés pour former la protéine correspondante.

Les maladies ribosomiques, ou ribosomopathies, sont des maladies associées à une anomalie des ribosomes. Ces anomalies peuvent toucher la structure ou la fonction du ribosome (à la fois au niveau de l’ARN messager ou de la protéine ribosomique), ou bien affecter un gène lié à la biogénèse des ribosomes. La plupart des ribosomopathies sont classifiées comme des maladies génétiques rares. Parmi elles, l'anémie de Blackfan-Diamond (ABD) correspond à une érythroblastopénie congénitale : la moelle osseuse est incapable de produire des globules rouges en quantité suffisante. Le syndrome de Treacher Collins est, quant à lui, une dysostose mandibulofaciale ; il se manifeste par des malformations du visage.

 


Source

Pathogenic variants in the DEAH-box RNA helicase DHX37 are a frequent cause of 46,XY gonadal dysgenesis and 46,XY testicular regression syndrome. Genetics in Medicine. 24 juillet 2019.

McElreavey K, Jorgensen A, Eozenou C, Merel T, Bignon-Topalovic J, Tan DS, Houzelstein D, Buonocore F, Warr N, Kay RGG, Peycelon M, Siffroi JP, Mazen I, Achermann JC, Shcherbak Y, Leger J, Sallai A, Carel JC, Martinerie L, Le Ru R, Conway GS, Mignot B, Van Maldergem L, Bertalan R, Globa E, Brauner R, Jauch R, Nef S, Greenfield A, Bashamboo A.

DOI : 10.1038/s41436-019-0606-y

 

AURÉLIE PERTHUISON
Responsable des relations presse

ANNE BURLET-PARENDEL
Attachée de presse

MYRIAM REBEYROTTE
Attachée de presse

NATHALIE FEUILLET
Chargée des relations presse

 

MARGAUX PUECH PAYS D'ALISSAC

Attachée de presse

 

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