Du moustique tigre, désormais bien implanté en Europe, aux espèces endémiques des tropiques ou du Pacifique, ces insectes ont su coloniser de vastes territoires et jouent un rôle important dans les écosystèmes locaux. Environ une centaine de moustiques piquent l'humain, et seuls certains peuvent transmettre des virus. Leur diversité et leur expansion géographique imposent une attention particulière à leur identification et à leur répartition.
Parmi les nombreuses espèces de moustiques, certaines jouent le rôle de vecteur dans la transmission de maladies infectieuses chez l’être humain à l’échelle mondiale. Ce sont près de 3500 espèces de moustiques qui ont été décrites, dont 65 ont déjà été retrouvées en France hexagonale. Parmi les 3500 espèces de moustiques, seule une centaine d’espèces piquent l’humain.
On sait déjà que chaque espèce de moustique (chaque vecteur) possède ou ne possède pas une capacité à transmettre un type d’arbovirus particulier. Et ce, même lorsque plusieurs espèces partagent le même environnement. Les scientifiques parlent de “compétence du vecteur” à transmettre tel ou tel virus, ou de spécificité vectorielle. Les mécanismes expliquant pourquoi seuls certains moustiques sont aptes à transmettre spécifiquement des arbovirus en tant que vecteurs sont encore mal connus. On sait toutefois déjà que cette spécificité est modulée par l'affinité moléculaire du moustique et du virus. Entrent en compte aussi les facteurs écologiques et comportementaux qui peuvent constituer un obstacle ou un facteur favorisant à la transmission des maladies.
Quelques exemples d’études récentes sur la "compétence vectorielle”, ou capacité de certains moustiques à transmettre certains virus :
- Le moustique tigre capable de transmettre le virus du chikungunya à des températures tempérées
- Moustique tigre : deux virus nouvellement transmis des oiseaux à l’humain
- Chikungunya : comment le moustique tigre aide le virus à traverser les frontières
- Fièvre jaune : risque de transmission du virus dans la région Asie-Pacifique
- Chikungunya : les interactions entre génotype de moustique et génotype du virus ont influencé la compétence vectorielle d’Ae. albopictus
- En France, Aedes albopictus transmet mieux le « Zika » africain que celui asiatique
Les moustiques Aedes et maladies virales émergentes à fort impact sanitaire
Les moustiques du genre Aedes occupent une place centrale : Aedes aegypti (moustique de la fièvre jaune ou plus rarement, moustique tigre urbain) est responsable de la transmission de la dengue, du virus Zika et du chikungunya principalement dans les régions tropicales et subtropicales d’Amérique, d’Afrique, d’Asie et dans le Pacifique, ou encore de la fièvre jaune en Amérique du sud et Afrique. Une autre espèce du même genre, Aedes albopictus (moustique tigre), originaire d’Asie, a, quant à lui, largement colonisé l’Europe, les Amériques, l’Afrique et l’océan Indien, participant à la diffusion de la dengue, du chikungunya, du virus Zika et filariose. Leur compétence à transmettre le virus de la fièvre jaune a même été avérée.
Dans les îles du Pacifique, notamment en Polynésie française, c’est Aedes polynesiensis qui provoque la transmission du virus Zika, de la dengue et du chikungunya, mais également de la filariose lymphatique, source de graves complications telles que le lymphœdème.
Le moustique Anopheles principal candidat dans la transmission du paludisme
Le paludisme, maladie parasitaire majeure, est transmis par les moustiques du genre Anopheles. Parmi eux, Anopheles gambiae, Anopheles funestus et Anopheles stephensi (réunis sous le nom de moustiques anophèles) sont les principaux responsables en Afrique, en Asie tropicale et en Amérique latine de la transmission du paludisme mais aussi de la filariose.
Le genre Culex : une aire de répartition étendue
Enfin, les moustiques du genre Culex dont Culex quinquefasciatus et Culex pipiens, souvent appelés moustiques communs sont présents sur presque tous les continents. Ils participent à la propagation du virus du Nil occidental (West Nile), de l’encéphalite japonaise, de la filariose lymphatique, du virus Usutu ou encore de l’encéphalite de St. Louis, touchant aussi bien l’Europe et l’Afrique que les Amériques et l’Asie.
Voici l'état des lieux des principales espèces de moustiques vecteurs de maladies infectieuses, avec les maladies transmises et leurs zones géographiques :
Espèces | Aedes aegypti | Aedes albopictus | Aedes polynesiensis | Anopheles spp. | Culex spp. |
Nom commun | Moustique de la fièvre jaune (moustique tigre urbain) |
Moustique tigre | / | Moustique anophèle | Moustique commun |
Maladies transmises | Dengue, Zika, Chikungunya, Fièvre jaune |
Dengue, Chikungunya, Zika |
Lymphoedème filarien, Zika, Dengue, Chikungunya |
Paludisme, Filariose (certaines espèces) | Virus du Nil occidental (West Nile), Encéphalite japonaise, Filariose lymphatique, Virus du Usutu, Encéphalite St. Louis |
Zones géographiques | Régions tropicales et subtropicales d’Amérique, d’Afrique, d’Asie,t du Pacifique. |
Asie originellement, expansion en Europe (notamment bassin méditerranéen), Amériques, Afrique, océan Indien. |
Océanie, notamment Polynésie française et îles du Pacifique-Sud. |
Afrique, Asie tropicale, Amérique latine. | Monde entier |
A consulter pour retrouver une carte de la répartition des espèces de moustiques en fonction des maladies retrouvées dans un territoire donné :
Frontiers | Vector Specificity of Arbovirus Transmission
Qu’ils soient anophèles dans les zones à paludisme, moustiques tigres dans les régions touchées par la dengue et le chikungunya, ou moustiques communs dans les foyers de virus du Nil occidental, ces espèces témoignent de la grande adaptabilité des moustiques, et de la nécessité d’une surveillance internationale continue face à la diversité des maladies vectorielles. Et cela, particulièrement dans un contexte de changement climatique et de flux de population intercontinental.