Le prix ALBERT-EINSTEIN 2018 est remis à Jean-Pierre Changeux

Communiqué de presse
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Le prix ALBERT-EINSTEIN 2018 (World Award of Science) est décerné au Professeur Jean-Pierre Changeux, professeur émérite de neurosciences à l’Institut Pasteur, au Collège de France, où il a été titulaire de la chaire Communications cellulaires de 1976 à 2006, et à l’International Faculty, Kavli Institute for Brain & Mind, University of California (San Diego).

Ce prix récompense l’apport scientifique exceptionnel de Jean-Pierre Changeux, ainsi que son leadership dans le domaine des neurosciences, s’agissant notamment de ses contributions pionnières à la science et à la compréhension des neurorécepteurs ces 50 dernières années. Il est ainsi à l’origine de la découverte révolutionnaire du récepteur de l’acétylcholine en tant que modèle de récepteur membranaire, l’un des principaux mécanismes régulateurs en biologie, offrant un éclairage original sur la chimie du cerveau et, in fine, sur la relation cerveau-esprit.

En lui attribuant ce prix, le jury reconnaît les retombées déterminantes de ses recherches sur la santé et sur notre compréhension des processus neuronaux humains. Les réflexions profondes du Professeur Changeux sur le mécanisme des réseaux neuronaux ont rapproché biologie moléculaire et sciences cognitives.

Au début de sa carrière dans les années 1960, travaillant avec Jacques Monod, François Jacob et Jeffries Wyman, il est à l’origine d’une découverte majeure qui a conduit au développement de la théorie des transitions allostériques des protéines. Désormais bien établie, cette théorie partait du postulat que des ligands régulateurs contrôlent l’activité des sites actifs des enzymes lorsqu’ils se lient à des sites topologiquement distincts.

Le Professeur Changeux propose, peu après, un concept similaire pour expliquer le comportement des récepteurs synaptiques vis-à-vis des neurotransmetteurs. Il confirme son hypothèse au cours des décennies qui suivent. Il caractérise et purifie le récepteur de l’acétylcholine à partir de l’organe électrique de poisson, identifiant le premier récepteur d’un neurotransmetteur et d’un canal ionique ligand-dépendant.

D’autres études montrent que les maladies humaines sont associées à des mutations qui modifient l’équilibre conformationnel des protéines allostériques, dont les récepteurs des facteurs de croissance. Par ailleurs, la plupart des médicaments développés pour moduler les récepteurs couplés aux protéines G sont en réalité des modulateurs allostériques. De nombreuses entreprises pharmaceutiques et de biotechnologies mettent actuellement au point des modulateurs allostériques de récepteurs ou autres protéines clés des cellules humaines pour traiter efficacement les troubles neurologiques et d’autres maladies, comme le cancer.

En passant des molécules et neurones isolés ou des cellules musculaires au développement des réseaux neuronaux, le Professeur Changeux et ses collègues franchissent un pas considérable, exposant en termes mathématiques puis testant la théorie de la longue épigenèse des réseaux neuronaux par stabilisation sélective et élimination des synapses en développement.

Parallèlement, Jean-Pierre Changeux et ses confrères proposent des modèles théoriques de certaines tâches cognitives, qui rapprochent biologie moléculaire et sciences de la cognition et dans lesquels les récepteurs allostériques jouent un rôle clé s’agissant de la régulation de l’efficacité synaptique. En outre, ils avancent une hypothèse originale dans leur description d’un mécanisme neuronal d’accès conscient, impliquant l’existence d’un « espace de travail neuronal global » composé d’un réseau horizontal de longs neurones pyramidaux axonaux interconnectés à l’échelle du cerveau.

Jean-Pierre Changeux s’est constamment préoccupé des conséquences éthiques pour la médecine et la société en général des récents progrès en neurosciences, dans son célèbre ouvrage L’homme neuronal (1983) et dans le livre co-écrit avec Paul Ricœur, La Nature et la Règle : ce qui nous fait penser (1998), qui confronte le neuroscientifique au philosophe sur l’éthique, la nature humaine et le cerveau. Il publie ensuite sur la manière dont nous percevons les œuvres picturales et musicales ou encore sur notre façon de penser et de parler, des sujets qu’il enrichit de ses vastes connaissances de l’art, de la musique, de l’histoire et de la philosophie.

Tout au long de sa carrière, il se constitue une importante collection d’œuvres d’art, principalement des toiles et des gravures du XVIIe siècle, dont il offre une grande partie, avec sa femme Annie Changeux, au musée Bossuet de Meaux.

Le Professeur Changeux multiplie les récompenses et distinctions scientifiques, parmi lesquelles le prix Wolf de médecine (1983), le Grand prix de la Fondation pour la recherche médicale (1997), la médaille Linus Pauling (1999) et le prix Balzan (2001). Il est membre de diverses académies des sciences et des lettres, dont l’Academia Europaea, l’Accademia dei Lincei, l’Academia Leopoldina et l’Académie des sciences, et docteur honoris causa d’une vingtaine d’universités dans le monde.

Cette année, le Conseil culturel mondial (CCM) organisera la 35e cérémonie de remise de prix le jeudi 8 novembre 2018 à 16 h 30 à l’université municipale de Hong Kong. Cette université innovante est le lieu idéal pour mettre à l’honneur les remarquables découvertes des lauréats des prix décernés par le CCM et célébrer l’inspiration qu’ils insufflent en tant que modèles de rôles pour les générations futures.

Dans le cadre du programme de la cérémonie, le CCM, en coopération avec l’université municipale de Hong Kong, prévoit l’intervention des lauréats afin de susciter leur interaction avec la communauté locale. Ces interventions se dérouleront le mercredi 7 novembre.

Au cours de la cérémonie de remise de prix, le Conseil culturel mondial rendra un hommage spécial aux jeunes savants et chercheurs de Hong Kong qui se sont illustrés dans les domaines des sciences, de l’enseignement ou des arts. Cette année, neuf chercheurs prometteurs de l’université municipale de Hong Kong se verront remettre un diplôme commémoratif pour leurs premiers travaux exemplaires.

Depuis plus de trente ans, le Conseil culturel mondial couronne des individus qui se sont distingués par leurs formidables réalisations dans les domaines des sciences, de l’enseignement ou des arts, avec l’objectif de promouvoir la tolérance, la paix et la fraternité et d’encourager l’application de ces domaines à l’amélioration du bien-être de l’humanité.


Liens connexes :

http://www.consejoculturalmundial.org

http://www.cityu.edu.hk/2018-wcc/

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