Zika : une estimation précise des risques neurologiques chez les enfants à naître

Communiqué de presse
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Grâce à une étude menée pendant l'épidémie de Zika dans les territoires français d'Amérique auprès de femmes enceintes et de leurs enfants à naitre, les chercheurs, de l'Inserm, de l'Institut Pasteur et du CHU de la Guadeloupe ont pu estimer précisément le risque de complications neurologiques graves pour les bébés. Ils ont également déterminé que le 1er trimestre de grossesse était la période la plus à risque. Si le risque global est de 7 % il est effectivement de 12.7%, (soit plus d'un enfant sur 10) quand l'infection survient dans les 3 premiers mois de grossesse. Ces travaux sont publiés dans le New England Journal of Medicine (NEJM).

 

En février 2016, face à l'augmentation drastique du nombre de personnes infectées par le virus Zika et surtout pour établir le lien entre le virus et les complications neurologiques, l'OMS déclare une « urgence de santé publique de portée internationale ». Au mois de mars 2016, avec l'aide du consortium REACting, l'Inserm a pris en charge la mise en place, la promotion et le suivi scientifique d'une cohorte de femmes enceintes exposées au virus Zika dans les Territoires Français d'Amérique, suivie par le Centre d'Investigation Clinique Antilles-Guyane (Inserm CIC 1424 des CHU de la Guadeloupe, de la Martinique et du CH de Cayenne). L'objectif : étudier en situation épidémique, les complications fœtales et néonatales associées à l’infection par le virus Zika. Cette cohorte a été financée par la Direction générale de l’offre de soins (Soutien Exceptionnel à la Recherche et à l'Innovation) et s'inscrit dans le cadre du programme européen ZIKAlliance1.

Plusieurs milliers de femmes enceintes ayant conduit leur grossesse pendant l'épidémie de Zika dans les Territoires français dans les Amériques ont été incluses dans cette cohorte entre mars 2016 et août 2017. L'article publié dans le NEJM porte sur les femmes de la cohorte qui ont présenté une infection à virus Zika confirmée biologiquement entre mars 2016 et novembre 2016. Elles ont alors été suivies tous les mois jusqu'au terme de leur grossesse. Toutes les complications et traitements reçus ont été consignés et si une anomalie fœtale était détectée lors d'une échographie, un examen supplémentaire du fœtus par imagerie par résonance magnétique était réalisé.

Les résultats obtenus par les chercheurs montrent que le taux d'anomalies neurologiques congénitales observées chez les fœtus et bébés issus de cette cohorte de femmes enceintes est de 7 %, ce qui est beaucoup plus faible que ce qui a été initialement observé au Brésil, et proche de ce qui a été observé dans le registre américain.

L'étude confirme que le risque est surtout important lorsque l'infection survient au cours du premier trimestre de grossesse.

En détail les résultats montrent que la fréquence des complications neurologiques est de :

  • 12.7% lorsque la mère est infectée au cours du 1er trimestre de grossesse.
  • 3.6% lorsque la mère est infectée au cours du 2er trimestre de grossesse
  • 5.3% lorsque la mère est infectée au cours du 3eme trimestre de grossesse

De même, le pourcentage de microcéphalies graves (périmètre crânien < -3DS) est de 1,6% globalement, et :

  • 3.7% lorsque la mère est infectée au cours du 1er trimestre de grossesse.
  • 0.8% lorsque la mère est infectée au cours du 2er trimestre de grossesse
  • 0 lorsque la mère est infectée au cours du 3eme trimestre de grossesse

"Ces résultats sont les premiers issus des analyses de cette cohorte car les bébés sont encore très jeunes mais le suivi de l’ensemble des enfants sera indispensable pour identifier d’éventuelles complications plus tardives." explique Bruno Hoen, médecin chercheur à l’Inserm et au CHU de la Guadeloupe et investigateur principal de l’étude.

 

Arnaud Fontanet - Institut Pasteur

Même si ces taux de complications sont faibles par rapport à d’autres infections virales chez la femme enceinte, ils restent préoccupants car en phase épidémique le virus Zika peut contaminer plus de 50% d’une population

Arnaud Fontanet​Responsable de l’unité d’Epidémiologie des maladies émergentes à l’Institut Pasteur, et co-investigateur de l’étude

 

REACTing (REsearch and ACTion targeting emerging infectious diseases)

L’Inserm et ses partenaires d’Aviesan ont mis en place REACTing, un consortium multidisciplinaire rassemblant des équipes et laboratoires d’excellence, afin de préparer et coordonner la recherche pour faire face aux crises sanitaires liées aux maladies infectieuses émergentes. Depuis sa création, REACTing a ainsi monté des programmes autour de des épidémies de Chikungunya, Ébola ou encore Zika.

La recherche clinique à l'Inserm

Le pôle de recherche clinique assure la promotion pour le compte de l’Inserm d’essais cliniques et exerce la co-tutelle avec la DGOS, des centres d’investigation clinique (CIC). En 2017 Il a été en charge de 238 études dont 15 projets européens et/ou internationaux.

 

 1ZIKAlliance est un projet de 3 ans financé par le programme Horizon 2020 pour la recherche et l’innovation de l’Union Européenne selon l’accord de financement n° 734548.

 


Sources

Pregnancy Outcomes after ZIKV Infection in FrenchTerritories in the Americas

Bruno Hoen, M.D., Ph.D., Bruno Schaub, M.D., Anna L. Funk, M.Sc.,Vanessa Ardillon, M.D., Manon Boullard, M.Sc., André Cabié, M.D., Ph.D.,Caroline Callier, M.Sc., Gabriel Carles, M.D., Sylvie Cassadou, M.D.,Raymond Césaire, M.D., Ph.D., Maylis Douine, M.D., Ph.D.,Cécile Herrmann-Storck, M.D., Philippe Kadhel, M.D., Ph.D.,Cédric Laouénan, M.D., Ph.D., Yoann Madec, Ph.D., Alice Monthieux, M.D.,Mathieu Nacher, M.D., Ph.D., Fatiha Najioullah, Ph.D.,Dominique Rousset, M.D., Ph.D., Catherine Ryan, M.D.,Kinda Schepers, M.D., Ph.D., Sofia Stegmann-Planchard, M.D., M.P.H., Benoît Tressières, M.Sc., Jean-Luc Voluménie, M.D., Samson Yassinguezo, M.D., Eustase Janky, M.D., Ph.D., and Arnaud Fontanet, M.D., Dr.P.H.

The authors’ affiliations are as follows: From INSERM Centre d’Investigation Clinique 1424 (B.H.,C.C., B.T.), Service de Maladies Infectieuses et Tropicales, Dermatologie, Médecine Interne (B.H.,K.S.), Cellule d’Intervention en Région (CIRE) Antilles, Santé publique France (S.C.), Laboratoire de Microbiologie (C.H.-S.), Service de Gynécologie Obstétrique (P.K.), Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Prénatal (C.R.), and Pôle Parent-Enfant (E.J.); Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Pointe à Pitre/Abymes, and Université des Antilles et de la Guyane, Faculté de Médecine Hyacinthe Bastaraud (B.H.), Pointe-à-Pitre, Guadeloupe; Centre Pluridisciplinaire de Diagnostic Prénatal, Maison de la Femme de la Mère et de l’Enfant (B.S.), INSERM Centre d’Investigation Clinique (M.B.,A.C.), Centre de Ressources Biologiques (R.C.), Unit of Obstetrics and Gynecology, Maison de laFemme de la Mère et de l’Enfant (A.M., J.-L.V.), and Laboratoire de Virologie (F.N.), CHU Martinique, Fort-de-France, Martinique; the Emerging Diseases Epidemiology Unit (A.L.F., Y.M.,A.F.) and Center for Global Health (A.F.), Institut Pasteur, INSERM, IAME (Infection, Antimicrobials, Modeling, Evolution), Paris Diderot University (C.L.), and Conservatoire National des Arts et Métiers, Unité Pasteur-Cnam Risques Infectieux et Émergents (A.F.), Paris; CIRE de Guyane, Santé publique France (V.A.), Pôle Mère-Enfant, Centre Hospitalier de l’Ouest Guyanais (G.C.), INSERM Centre d’Investigation Clinique 1424 (M.D., M.N.), Laboratoire de Virologie, Institut Pasteur de la Guyane (D.R.), and Service de Gynécologie Obstétrique, Centre Hospitalier de Cayenne (S.Y.), French Guiana; and Unité de Maladies Infectieuses, Centre Hospitalier Louis Constant Fleming, St.

Martin (S.S.-P.) — all in France.

New England Journal of medicine https://dx.doi.org/10.1056/NEJMoa1709481

 
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