Projet SARA : Renforcer la surveillance de l'antibiorésistance en Afrique grâce à la formation

Actualité
|

Pour poursuivre ses efforts dans la lutte contre l’antibiorésistance, l’Institut Pasteur, en collaboration avec l’Institut Pasteur de Dakar, réédite sa semaine de cours dans le cadre du projet SARA (Surveillance de l'Antibiorésistance en Afrique). Lors de la première édition en 2022 à Paris, le projet SARA a marqué un repère important en fournissant aux participants des connaissances approfondies sur l’utilisation des outils bio-informatiques accessibles en ligne pour l'exploitation des données de séquençage génomique pour la surveillance de l'antibiorésistance. Cette initiative a permis aux participants de renforcer leurs compétences dans l'analyse génomique des souches bactériennes résistantes aux antibiotiques. Le cours de cette année à Dakar adopte une approche pluridisciplinaire en mettant l’accent sur la pratique de séquençage portatif en laboratoire.

Face à l'antibiorésistance, une priorité de santé publique définie par l’OMS, l'équipe du Dr Sylvain Brisse, responsable de l’unité "Biodiversité et épidémiologie des bactéries pathogènes" à l'Institut Pasteur, réédite le programme de formation dans le cadre du projet de surveillance SARA destiné aux microbiologistes bénéficiaires du projet mais aussi à d'autres instituts du Pasteur Network.

Cette seconde édition, qui s’est déroulée du 21 au 26 mai 2023 à l’Institut Pasteur de Dakar, a accueilli 21 participants de 9 pays d’Afrique et a inclus des travaux pratiques de séquençage portatif coordonnés par Dr Chiara Crestani, experte dans ce domaine à l’Institut Pasteur à Paris. Dr Cheikh Fall, assistant de recherche en microbiologie à l'Institut Pasteur de Dakar, participant à l’édition de Paris et co-organisateur du cours de cette année, souligne les changements apportés : « Le cours SARA a connu une évolution remarquable depuis sa première session. De nombreux participants n'étaient pas familiers avec le séquençage et l'analyse des séquences d’où la concentration initiale sur la bio-informatique et l'exploitation des données. Cette année, pour aller plus loin, les participants ont appris les étapes de préparation des échantillons de cultures bactériennes, les contrôles de qualité et la préparation des librairies pour le séquençage. La partie bio-informatique, a aussi été abordée avec une révision des plateformes vues à Paris et l’ajout de nouvelles ressources. »

Dr Fall souligne la progression marquée des participants et l’attribue à l’intégration du cours de l’an dernier avec des actions de suivi tout au long de l’année : « Le point fort du cours SARA, c'est sa résilience grâce à la mise en place de groupes de travail et de webinaires. Cette approche favorise le maintien des acquis et le renforcement mutuel des connaissances ».

Dr Tchepé Flore Bernadette Diplo, docteur spécialiste en biologie moléculaire à l’Institut Pasteur de Côte d’Ivoire et Dr Ariane Nzouankeu, microbiologiste au Centre Pasteur du Cameroun nous expliquent l'impact du cours SARA sur leur activité quotidienne.
 

Que vous a apporté la série de cours SARA ?

Dr Ariane Nzouankeu : « Une journée entière a été consacrée à la pratique en laboratoire. J'ai eu l'occasion de réaliser pour la première fois la partie pratique du séquençage, car habituellement, au Centre Pasteur du Cameroun, nous envoyions nos échantillons à des plateformes européennes. Le reste de la semaine était dédié aux analyses bio-informatiques, dans la continuité du premier cours SARA à Paris. Cette semaine a été une occasion précieuse de renforcer nos connaissances et de nous familiariser avec de nouvelles technologies et techniques de séquençage, notamment l'utilisation du séquençage de 3e génération Nanopore. »

Dr Tchepé Flore Bernadette Diplo : « Le cours m'a été très utile pour comprendre quelles données génomiques sont nécessaires pour étudier la résistance aux antibiotiques, malgré le fait que nous ayons déjà un séquenceur que nous avons utilisé pour la Covid-19 et l'identification de ses variants. J'ai appris quels types de données cibler et analyser pour atteindre les objectifs liés à la résistance aux antibiotiques, ainsi que les outils bio-informatiques nécessaires pour analyser ces données. »
 

Que vous êtes-vous apporté mutuellement, membres du projet SARA ?

Dr Ariane Nzouankeu : « Le premier cours à Paris a permis de mettre en place au sein du Pasteur Network, un réseau de laboratoires de bactériologie, un secteur où les différents intervenants ne se connaissaient pas véritablement. Cela nous a permis de nous connaître, de travailler ensemble par l'intermédiaire des différents groupes de travail mis en place et de créer des liens pour d’éventuelles collaborations. Cela permet aussi de pouvoir compter les uns sur les autres en cas de difficulté dans nos instituts, que ce soit pour l'identification, mais également pour l'analyse des génomes de certaines bactéries par exemple. »

Dr Tchepé Flore Bernadette Diplo : « J’ai été particulièrement marquée de constater que nous avons les ressources disponibles pour travailler sur cette thématique au sein du Pasteur Network. J'ai été impressionnée de voir des Africains engagés dans la même cause, travaillant ensemble pour faire face à ce défi commun. C’est l'un des grands avantages du projet SARA pour moi. »
 

Quelle sera la suite de vos activités après ces cours au sein du projet SARA ?

Dr Tchepé Flore Bernadette Diplo : « Nous allons commencer à produire des données et à les partager avec notre groupe de travail pour savoir comment les analyser et comparer nos résultats.
Nous devons continuer ce qui a été commencé et aller au-delà, c'est-à-dire introduire d'autres types d'échantillons, que ce soit dans la santé humaine, la santé animale ou la santé environnementale. Il faudra travailler avec les autres équipes pour savoir comment mettre en place un projet de partage de données dans ce sens. »

Dr Ariane Nzouankeu : « Notre priorité est de finaliser le projet SARA. C’est un projet très important pour les différents gouvernements africains, au travers des données qui seront générées, mais également, par la pratique des outils d’analyse des données de séquençage existantes dans notre laboratoire. Les outils d'analyse bio-informatique enseignés durant le cours nous permettront d'avoir des réponses beaucoup plus claires aux questions épidémiologiques et d'avoir des informations beaucoup plus fiables. Enfin, nous souhaitons déployer, au Centre Pasteur du Cameroun, le séquençage bactériologique. Au cours du projet SARA, nous avons réalisé que seule la génomique peut fournir des réponses essentielles sur les mécanismes de résistance, ouvrant ainsi la voie à l'élaboration de politiques de santé en lien avec l'épidémiologie et la génomique des bactéries. Nous espérons ainsi résoudre de manière plus efficace le problème de l'antibiorésistance grâce à des stratégies de lutte améliorées. »

Retour en haut