Chikungunya

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Actuellement en France, 64 départements rassemblent toutes les conditions propices à l’émergence du chikungunya :

  • la présence du moustique vecteur dans la région,
  • la température et l’humidité favorables à l’éclosion des œufs
  • de nombreux voyageurs revenant de pays où le virus du chikungunya circule.

Causes

Le virus chikungunya est un arbovirus (virus transmis par les arthropodes) dont les vecteurs sont des moustiques femelles du genre Aedes qui sont identifiables grâce à la présence de rayures noires et blanches. Les deux espèces incriminées sont Aedes aegypti et Aedes albopictus. Aedes albopictus est présent dans le sud de la France et Aedes aegypti dans les départements ultramarins (Antilles, Guyane), la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie. Ces deux moustiques sont également impliqués dans la transmission d’autres arbovirus, notamment la dengue, la fièvre jaune et le virus Zika.

Symptômes

Une infection fortement invalidante

En langue Makondée, chikungunya signifie « qui marche courbé en avant », et évoque la posture adoptée par les malades en raison d'intenses douleurs articulaires.

L’infection à virus chikungunya entraine en effet, après un délai d’incubation de 2 à 10 jours, des atteintes articulaires, souvent très invalidantes, concernant principalement les petites ceintures articulaires (poignets, doigts, chevilles, pieds) mais aussi les genoux et plus rarement, les hanches ou les épaules. A cette atteinte articulaire s’associent fréquemment des maux de tête, accompagnés de fièvre, des douleurs musculaires importantes, une éruption cutanée au niveau du tronc et des membres, une inflammation d’un ou plusieurs ganglion(s) lymphatiques cervicaux ou encore une conjonctivite.

Des saignements des gencives ou du nez ont en outre été fréquemment décrits, principalement en Asie.

Alors que les formes sévères de chikungunya n’étaient qu’exceptionnellement décrites dans les zones historiques d’endémie (Afrique, Asie), l’épidémie de 2005 survenue sur l’Ile de La Réunion a permis de montrer l’existence de formes neurologiques graves, notamment des méningo-encéphalites et des atteintes des nerfs périphériques. Ces dernières sont principalement rencontrées chez des personnes âgées, ou au système immunitaire affaibli, et chez des nouveau-nés, infectés in utero lors de l'infection de la mère.

Rémission et séquelles

Habituellement, la rémission des symptômes cliniques est assez rapide avec la disparition en quelques jours de la fièvre et des manifestations cutanées mais les signes articulaires peuvent perdurer sur plusieurs semaines. Il ne semble pas que l’infection par le virus chikungunya soit la cause directe des quelques cas mortels rapportés lors des épidémies.

L’atteinte articulaire peut durer sur un mode subaigu ou chronique pendant plusieurs mois voire plusieurs années, et ceci d’autant plus fréquemment que l’âge du malade est avancé : selon une étude rétrospective sud-africaine, elle concernerait 10% des patients 3 à 5 ans après une infection aiguë au virus chikungunya.

Epidémiologie

La première épidémie due au virus chikungunya a été décrite sur le continent africain, en Tanzanie en 1952. L’infection par le virus chikungunya a depuis continué à évoluer sur un mode endémo-épidémique sur les continents africain et asiatique, en particulier en Inde depuis 2006 (environ 2 millions de cas avérés et suspects) et dans l’Océan Indien. En 2007, le chikungunya a également fait sont apparition en Europe, touchant plusieurs centaines de personnes durant le mois de septembre dans le Nord-Est de l’Italie. En 2010,  les deux premiers cas autochtones de chikungunya ont été recensés en France, dans le Var. En 2011, la Nouvelle-Calédonie est touchée, en décembre 2013 une épidémie se déclare dans les Antilles, à Saint-Martin ; elle va se propager dans le reste de la Caraïbe puis sur le continent américain. Enfin, la Polynésie française est atteinte en 2014.

Europe

Aujourd’hui, l’hypothèse d’une dissémination du virus du chikungunya n’est pas à exclure dans les régions tempérées d’Europe où le moustique vecteur Aedes albopictus - dit le moustique tigre - est établi, notamment en Italie et dans le sud de la France. En septembre 2007, une flambée épidémique est survenue en Italie, dans la région de Ravenne (Nord-Est), touchant environ 300 personnes. Elle aurait été introduite par un voyageur en provenance d’Inde. Les deux premiers cas autochtones de chikungunya en France ont été détectés en 2010 dans le Var puis en octobre 2014, 12 autres cas autochtones ont été observés à Montpellier. En 2017, 17 autres cas de chikungunya ont été recensés dans la région PACA.  Le risque que la dengue et le chikungunya se propagent en Europe du Sud est donc surveillé par les autorités de santé. En conséquence, l’infection à chikungunya a été ajoutée à la liste des maladies à déclaration obligatoire et depuis janvier 2006, un dispositif de surveillance renforcée a été mis en place.

Afrique et Asie

L’aire de distribution du virus du chikungunya s’étend à toute l’Afrique sub-saharienne et à l’Asie du Sud-Est. En Afrique, le virus est maintenu au sein d’un cycle forestier faisant intervenir des primates et des moustiques sylvatiques (Aedes luteocephalus, Aedes furcifer ou Aedes taylori). En Asie, où son introduction serait plus récente, le virus circule dans un cycle essentiellement urbain qui implique les moustiques Aedes aegypti et Aedes albopictus.

Depuis sa description initiale en Tanzanie, le virus chikungunya a été régulièrement à l’origine de petites poussées épidémiques cycliques en milieu rural, principalement en Afrique australe et de l’Est, de l’Ouganda à l’Afrique du Sud et en Afrique Centrale. Sur ce continent, la dernière épidémie importante est survenue en 2007 au Gabon, avec 5000 cas suspectés. Le virus chikungunya est plus rarement trouvé en Afrique de l’Ouest, en particulier au Sénégal. Il est considéré comme endémique en milieu rural en Afrique, où il est probablement responsable de nombreux cas non diagnostiqués.

Parallèlement, des poussées épidémiques ont été observées en Inde, au Sri Lanka, en Asie Sud-Est (Thaïlande, Myanmar, Vietnam, Laos, Cambodge, Indonésie, plus récemment Malaisie) et aux Philippines. Quelques cas sporadiques ont été signalés à Singapour en 2009. Une importante vague épidémique frappe l’Inde depuis janvier 2006 avec quelque deux millions de cas suspectés enregistrés à ce jour. La fréquence plus importante des épidémies en Asie peut être reliée au caractère anthropophile des moustiques vecteurs en cause.

Océan Indien

Dans l’Océan Indien, aucune activité du virus chikungunya n’avait été détectée avant le début de l’année 2005. Le virus, vraisemblablement originaire d’Afrique de l’Est, a provoqué une première épidémie aux Comores. La transmission du virus a probablement été assurée par le moustique Aedes aegypti qui est prédominant dans cet archipel.

En mars 2005, l’épidémie s’est propagée rapidement dans l’île de La Réunion à partir du Nord-Ouest, avec une flambée importante entre fin avril et début juin puis une persistance de la transmission virale durant l’hiver austral. Sur cette île, la transmission du virus est assurée principalement par le moustique Aedes albopictus qui s’y est répandu grâce à sa grande plasticité écologique puisqu’il colonise indifféremment les zones urbaines et selvatiques, les gîtes artificiels et naturels. Au total, environ 270 000 personnes auraient été infectées, pour une population totale de 750 000 habitants. En parallèle, dès fin mars 2005, les îles Seychelles, Maurice et Mayotte ont été également touchées par l’épidémie de virus chikungunya, avec une augmentation des cas dès janvier 2006. Madagascar a également connu une circulation active du virus. Au printemps 2010, le chikungunya a à nouveau fait parler de lui sur l’Ile de La Réunion, avec une vingtaine de cas confirmés.

Amérique

Deux cas d’importation en provenance de Madagascar ont été identifiés en Guyane française en mars 2006, soulignant le risque d’émergence du virus dans les territoires français des Amériques. En décembre 2013, l’épidémie s’est déclarée aux Antilles, à Saint-Martin, et a rapidement progressé. La Martinique et la Guadeloupe ont été très impactées et l’épidémie s’est ensuite propagée dans toute la Caraïbe pour finalement atteindre pour la première fois le continent américain et là aussi être à l’origine d’une forte épidémie.

Traitement et prévention

La prise en charge médicale est purement symptomatique, reposant sur des traitements anti-douleurs et anti-inflammatoires. Ces traitements n’ont cependant aucun effet préventif sur la survenue d’une évolution chronique. Une corticothérapie peut s’avérer nécessaire dans les formes sévères d’évolution subaiguë – chronique.

La prévention de cette infection est à la fois collective et individuelle, reposant sur la lutte anti-vectorielle. A l’échelle individuelle, il s’agit de limiter sa propre exposition au moustique vecteur, en portant des vêtements longs, en s’appliquant des répulsifs cutanés, et en utilisant des insecticides sur les vêtements et les moustiquaires. Collectivement, une lutte anti-vectorielle à large échelle consiste en des épandages précautionneux d’insecticides et une élimination des gîtes larvaires potentiels, particulièrement autour des habitations (pots de fleur, récipients divers, pneus usagés, déchets encombrants, etc.).

 

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Juillet 2021

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